Une des caractéristiques du traumatisme, aujourd’hui prouvée scientifiquement et connue de beaucoup d’entre nous, est l’incapacité qu’il provoque en nous à exprimer clairement ce qui nous arrive. Non seulement les mots nous manquent mais notre mémoire est également affectée. Lors d’un incident traumatique, nos pensées peuvent s’éparpiller et se désorganiser de telle manière que l’on n’associe plus correctement les souvenirs à l’événement originel. Au lieu de ça des fragments de souvenirs, sous forme d’images éparses, de sensations physiques et de mots, sont entreposés dans notre inconscient et réapparaissent parfois, plus tard, à l’occasion d’un événement qui n’a plus rien à voir avec l’expérience première. Une fois déclenchés, ces souvenirs fragmentés nous font revivre des aspects du traumatisme originel dans notre vie quotidienne. Inconsciemment, nous reproduisons parfois avec certaines personnes des évènements ou situations qui, en empruntant des schémas familiers, anciens, renvoient au passé.
Sigmund Freud, avait identifié ce phénomène ? La répétition du traumatisme, ou la « compulsion de répétition », n’est autre que la tentative de l’inconscient de rejouer ce qui n’a pas été résolu, comme pour « corriger ». Ce besoin inconscient de revivre des évènements passés pourrait bien être un mécanisme en jeu quand les familles répètent des traumatismes irrésolus de génération en génération.
Carl Jung, pensait également que ce qui reste inconscient ne se dissout pas, mais, au contraire, refait surface dans nos vies comme un mauvais sort ou une grâce. Nous sommes sans doute condamnés à répéter des processus inconscients tant que nous n’en prenons pas conscience.
Les découvertes récentes en imagerie ont permis aux chercheurs de démêler les fonctions cérébrales et physiologiques qui « lâchent » ou se détériorent lors d’épisodes accablants. Bessel Van der Kolk, psychiatre spécialisé dans le stress post traumatique, explique que lors d’un traumatisme, la région du langage ne fonctionne plus et que le centre préfrontal médial, la partie du cerveau qui régit les expériences du moment présent, n’opère plus. Il apparente la terreur de se retrouver sans voix au moment du traumatisme à une épreuve qui constitue à chercher ses mots, un phénomène courant quand les chemins qu’emprunte le cerveau pour se souvenir sont entravés par la menace ou le danger.
Aujourd’hui apparaissent de nouvelles tendances en psychothérapie qui, en plus des traumatismes de l’individu, incluent le travail transgénérationnel afin de mettre en lumières les traumatismes familiaux et sociaux.
Les progrès récents établis dans les domaines de la biologie cellulaire, des neurosciences, de l’épigénétique et de la psychologie du développement soulignent à quel point il est important d’explorer au moins trois générations d’histoire familiale afin de comprendre le mécanisme qui commande la répétition de motifs traumatiques et douloureux.
Souvent, la prise de conscience doit s’accompagner d’une expérience afin de permettre de libérer les répétitions.
